Sous le commissariat éclairé de Róna Kopeczky, curatrice du pavillon hongrois à la Biennale de Venise (2024), cette exposition collective propose une plongée au coeur de la scène artistique hongroise contemporaine. À travers une sélection d’artistes émergents et confirmés, l’exposition met en lumière une nouvelle génération de plasticiens dont le travail résonne par sa singularité et son engagement formel.
Artistes:
Ádám ALBERT, Róbert BATYKÓ, Dániel BERNÁTH, Veronika CSONKA, József CSATÓ, EJTECH (Judit Eszter KÁRPÁTI and Esteban DE LA TORRE), Ákos EZER, Gideon HORVÁTH, Zsófia KERESZTES, Katalin KORTMANN-JÁRAY & Karina MENDRECZKY, Bence MAGYARLAKI, Mira MAKAI, Tamás MELKOVICS, Eszter METZING, Zsolt MOLNÁR, Luca Sára RÓZSA, Rita SÜVEGES et Kata TRANKER.
L’exposition présente une sélection d’oeuvres de 18 artistes émergents ou établis, utilisant une grande variété de médiums et abordant, de manière personnelle, sensible, étrange ou poétique, des thématiques environnementales et existentielles, l’histoire culturelle, l’identité et l’hybridité, ou encore les phénomènes sociétaux actuels.
Expérimentant des combinaisons audacieuses de matériaux ou évoluant dans les limites des formes d’art traditionnelles, les artistes adoptent des approches éco-critiques de la représentation de la nature, interrogent la relation entre l’individu et la société, l’humanité et son environnement, ou explorent les notions de mémoire collective, de souvenir et d’expérience corporelle. L’exposition dégage une atmosphère troublante et ambivalente, oscillant entre floraison et décadence, sensualité et virtualité, figuration et abstraction, analogique et numérique, réel et surréel, archaïque et contemporain.
Au cours des dernières décennies, la scène artistique contemporaine hongroise a fait l’objet d’une certaine forme d’exotisation, favorisée par l’attention massive que lui ont portée les institutions et les foires d’art, se concentrant sur la production conceptuelle et critique des artistes Néo-Avant-Gardistes de la fin des années 1960 au début des années 1980.
Travaillant généralement avec des moyens limités — photographie, objets, installations, collages ou poésie visuelle —, cette génération pionnière a adopté une esthétique bricolée, produisant à petite échelle, à la fois en raison de restrictions financières et techniques, mais aussi à cause du statut précaire de l’artiste visuel, souvent perçu par le régime socialiste comme un élément potentiellement problématique ou agité de la société. Cette image est quelque peu devenue le « sex-appeal » de l’art d’Europe centrale et orientale aux yeux des institutions d’Europe de l’Ouest et des États-Unis — et elle persiste encore aujourd’hui.
Sortir de ce stéréotype n’est pas une tâche aisée, mais la génération d’artistes présentée dans l’exposition Constellations incarne clairement cette volonté d’abondance, de profusion, et le désir de dépasser les cadres médiatiques limitants de leurs prédécesseurs. Tout en conservant le contenu critique, conceptuel, ambigu et contextuellement complexe de la génération pionnière, les artistes de Constellations travaillent à des échelles plus vastes, investissent pleinement l’espace et utilisent des médiums qui se sont diversifiés et sophistiqués. Ils ne portent plus les traits clairement reconnaissables de ce que l’on pourrait appeler le « chic low-tech Néo-Avant-Gardiste d’Europe de l’Est ».
Échappant à une esthétique rigoureusement minimale, les œuvres présentées dans l’exposition forment une profusion curieuse de formes, de couleurs et de matériaux qui, malgré leur éclat et leur richesse chromatique, portent les marques ambiguës de notre époque, oscillant entre sérénité et angoisse, joie et mélancolie. L’exposition présente également des oeuvres mettant l’accent sur la tactilité plutôt que sur la digitalité – même lorsque le médium principal repose sur une technologie nouvelle comme le stylo 3D, l’impression 3D, la découpe laser ou l’animation sonore –, révélant à quel point nous aspirons à l’acte simple de touche, dans un monde dématérialisé qui n’a jamais été aussi connecté, et pourtant si divisé.
Texte par Róna Kopeczky
Róna Kopeczky est une historienne de l’art et conservatrice franco-hongroise spécialisée dans l’art contemporain. Elle a travaillé en tant que curatrice d’art international au Musée Ludwig de Budapest entre 2006 et 2015, puis a rejoint la principale galerie d’art contemporain du pays, acb, en tant que directrice artistique. En 2024, elle a été la commissaire du pavillon hongrois à la 60e Biennale de Venise. Sa pratique curatoriale est riche de contributions à des projets internationaux visant à renforcer la visibilité de la scène artistique contemporaine hongroise et d’Europe centrale et orientale, tels que les première et deuxième éditions de l’OFF-Biennále de Budapest en 2015 et 2017, Manifesta 14 à Prishtina en 2022, et Secondary Archive (2021-en cours).
Publications :
– ű, 19 mai 2025 Együttállások – fiatal magyar képzőművészek Párizsban, A m