BEIJING SILVERMINE

Ces centaines de millier d’images, autant d’instantanées prises par des inconnus, donnent à voir un portrait authentique de la capitale chinoise au lendemain de la révolution culturelle, a l’heure des reformes d’ouverture.
C’est dans l’Hôtel Winssinger que la galerie Paris Beijing présente ses clichés, vidéos, éditions et installations dévoilant les fantasmes d’une Chine en mutation, s’ouvrant au monde.

On y retrouve des femmes posant fières devant leur premier réfrigérateur, des enfants avec Ronald Mc Donald ou encore des ado- lescents à côté du portrait d’une star hollywoodienne. Une imagerie populaire symbolisant une ouverture sur le monde et témoignant d’un pays en métamorphose: dans les années ’80 avec Deng Xiaoping la Chine entre dans l’ère capitaliste et l’achat des biens de consommation n’est plus condamné comme une déviance “droitiste”. A la même époque le temps libre s’institutionnalise, les em- ployés commencent à prendre des congés, à voyager et à profiter des loisirs. Les chinois prennent la pose devant les monuments, des parcs à thème ou encore devant les chefs d’œuvres occidentaux, comme la Joconde. Les photos de famille montrent souvent un enfant unique (politique instaurée dès 1979).

? Une étrange homogénéité se dégage de la diversité des clichés qui constituent une source d’archive inestimable. Le cadrage, la distance du sujet, la pose statique tout semble répondre aux mêmes codes. D’aucuns diraient qu’il s’agit de l’œuvre d’un seul regard.

Thomas Sauvin présentera également la série Lunar Caustic, née de sa collaboration avec la photographe Melinda Gibson. Diplômée en Photographie au London College of Communication, Melinda Gibson s’intéresse depuis à l’évolution des perspectives du médium photographique. Elle tend à « décontextualiser » la photographie d’archive de Thomas Sauvin en exploitant les infinies possibilités du procédé chimique du négatif. Grâce à son intervention plastique, les photos d’hier sont comme propulsées dans le monde d’au- jourd’hui. Entre art et chimie, les tirages sont brules par l’acide et le nitrate d’argent, afin d’isoler la véritable essence de l’image. Elle devient alors un objet instable, palpable, organique. Ces interventions violentes donnent une nouvelle existence aux images, évoquant avec poésie l’innovation destructrice et la renaissance.

Présentée au deuxième étage de l’Hôtel Winssinger, l’installation vidéo Reclycled est née de la rencontre avec l’artiste chinois Lei Lei. Cette animation stroboscopique réunit plus de 3000 images issues de l’archive, liées les unes aux autres par des thèmes, des lieux ou des compositions similaires, elle dévoile la nature profonde en quelques minutes seulement.

Né en 1985 Lei Lei a étudié le film d’animation à l’université de Tsinghua. Son film Recycled est le lauréat 2013 du Grand Prix du short film-non-narratif du Holland International Animation Fim Festival, ainsi que du festival du film d’animation AnifestInternational 2012. Il a obtenu une Mention spéciale de la part des membres du jury de Campagne Animafest Chypre en 2012 et il a été sélectionné par le Festival International d’Animation d’Annecy en 2013.

Le projet Beijing Silvermine dresse de manière positive le portrait d’un pays qui s’ouvre au monde. Il ne cherche pas la provocation ou la critique. Dans un souci sociologique et une démarche documentariste, il s’agit de présenter le visage de la Chine postsocial- iste, légère et insouciante, dont une partie de la population savoure la liberté retrouvée et l’accès à la société de consommation. Né de l’étroite collaboration entre trois figures différentes mais complémentaires, le projet donne aux images d’archives une approche ludique et pleine d’humour. Un champ du quotidien dans lequel le trio introduit une poésie liée au bonheur, à l’amour et à la joie.